Petit fille sauvage, enfant qui ne se mêle pas aux autres. T’es différente Plùm. T’as rien des gens de ton âge. Toi tu ne sors pas pour faire la fête, toi ne retrouves pas d’amis en fin d’après-midi pour boire un verre ou toutes ces conneries. Toi t’as pris cette habitude de fuir les gens, de fuir le monde. Toi, t’aimes la solitude. T’aimes le calme et le silence. Alors t’as fini par trouver cet endroit pendant l’une de tes nombreuses balades. Cette ville, tu finis par en connaitre les moindres recoins. Tu connais les endroits les plus sauvages parce que c’est ceux là dans lesquels tu passes tout ton temps. La civilisation, très peu pour toi. Tu n’aimes pas te mêler aux autres Joan. T’es constamment en train de le montrer. Tu les fusillent tous du regard mais tu ne parles pas. Jamais un son ne sort de tes lèvres avec ces gens. Il n’y a qu’avec les personnes dont tu es proche que tu parles. Mais c’est difficile. Très difficile de percer ta carapace. Tu ne laisses pas les gens t’approcher, tu ne leur laisses pas la possibilité de te connaitre un peu plus. Pourtant, tu avais prévu de faire des efforts. Mais c’est compliqué. Bien trop compliqué pour toi. Parce que t’es comme ça depuis toujours. Même enfant tu ne parlais pas aux autres. Pourtant, tu en croisais beaucoup qui venaient en vacances à la réserve. La preuve, Bel n’avait jamais eu aucuns problèmes elle. Bel, elle savait se lier aux autres. Ta soeur, elle était un vrai rayon de soleil. Tu savais que le problème s’était toi. Seulement toi.

T’avais une fois de plus séché tes cours de l’après-midi. Tu n’avais jamais trouvé l’intérêt d’y aller. Tu passais ton temps à dormir et tu ne te présentais pas aux examens. Enfin, t’avais plus le choix que d’aller de temps en temps en cours parce que t’avais tes parents sur l’dos. Ils avaient décidés de se prendre pour des parents maintenant que vous étiez aux États-Unis. Tu ne l’avais jamais accepté, tu ne pouvais pas alors qu’ils avaient été si absents jusqu’à maintenant. À la réserve, on te laissait tranquille. À la réserve, tu pouvais faire ta vie. Alors ici, tu faisais la même chose. Tu ne voulais pas que les choses changent Plùm. Pourtant, tout avais déjà changé. Le paysage que tu observais ici n’était pas le même que la savane. T’étais là sur les hauteurs d’Oro Valley, tu pouvais observer toute la ville. Tu aimais cet endroit, il t’apaisait. Tu aimais y dessiner, tu aimais t’appuyer contre le tronc d’un arbre et laisser le temps filer. Une fois de plus, tu avais ton crayon et ton bloc à dessin aujourd’hui. Tu dessinais. Tu dessinais les choses que tu avais pu observer aujourd’hui. Tu aimais dessiner les choses du quotidien. Ces choses que tu apprenais à faire depuis un an. Il n’y avait aucun but à ce que tu dessinais. Pas de partage non plus puisque tu aimais en garder la plupart pour toi. Puis, il arrivait alors que tu terminais les traits de cette vieille dame que tu avais croisé à la boulangerie. Elle avait été très marquée par la vie et t’aimais imaginer son histoire. Lui inventer un passif qui n’était probablement pas le sien. Lui il était là avec sa guitare. Tu savais qu’il allait s’installer à tes côtés pour jouer un morceau. Une simple mélodie, pas de paroles. Il n’y avait pas besoin de mots pour apprécier sa musique. Tu appréciais sa présence pourtant il n’y avait pas une seule parole d’échangée. Tu ne savais même pas son prénom. Pourtant, tu le laissais. Tu le laissais demeurer à tes côtés alors que très peu de personnes avaient cette chance. Sauf que les autres, ils avaient toujours ce besoin de parler. Ces autres, ils se sentaient obligés de te raconter leur vie. C’était ça que tu détestais. Tu n’en avais aucunement besoin. Tu as seulement besoin de silence. Ton silence adoré. Mais aujourd’hui, tu songes à le briser. Aujourd’hui, tu comptes mettre en application ces choses que tu te dis que tu dois faire depuis des mois mais que tu ne fais pas.  « Tu joues depuis longtemps ? » Tu ne mets pas de formes, tu ne prends même pas la tête de révéler le nez de ton dessin. C’est déjà beaucoup pour toi que de prononcer ça. Bel serait fière de toi. Bel, elle est t’encouragerait à parler bien plus. Mais, tu n’en aies pas capable. Tu ne veux pas non plus. Tu ne veux pas gâcher avec des mots cette mélodie qu’il est en train de jouer.